Vision duelle | été 2022
Avant de vouloir changer ou sauver le monde, chacun de nous devrait régulièrement se poser une question fondamentale :
« Ma vision est-elle claire ? N’est-elle pas voilée par mes croyances et ma réactivité ? Est-ce que je vois la Réalité ou ma réalité ? »
La vision duelle est la norme la plus répandue chez les humains. Elle nous est imposée dès notre plus jeune âge. « Toi et moi », « toi et le monde »
sont les premières pensées duelles que l’on nous inculque afin de nous permettre de construire notre personnalité. Ces codes sont utiles
pour se faire comprendre et pour œuvrer en société, mais ils finissent par devenir une vérité absolue que peu de personnes s’aventurent à questionner.
La perspective duelle divise le réel en entités distinctes. Elle nous rend matérialistes dans tous les domaines de notre vie. Les êtres vivants comme la nature
deviennent des objets sans substance que l’on s’arroge le droit de contrôler, manipuler et exploiter. Des objets que l’on s’approprie ou jette en fonction de nos humeurs et nos besoins.
Nous perdons le sens de notre valeur et de notre existence. Cette vision dualiste nous enferme dans l’image du corps et crée une distance artificielle entre la nature et l’humain,
entre l’autre et moi, entre le corps et l’esprit. Elle est à l’origine de tous les rapports d’opposition, d’exclusion et de domination.
En perdant contact avec la vérité de notre être, nous nous sommes coupés de notre puissance intérieure. Un sentiment lancinant de manque et d’incomplétude nous envahit.
Nous avons alors besoin de posséder et de maîtriser pour nous sentir pleins et entiers. La vie devient ma vie, l’enfant devient ma fille ou mon fils, l’émotion devient ma colère.
« Ma vision est-elle claire ? N’est-elle pas voilée par mes croyances et ma réactivité ? Est-ce que je vois la Réalité ou ma réalité ? »
La vision duelle est la norme la plus répandue chez les humains. Elle nous est imposée dès notre plus jeune âge. « Toi et moi », « toi et le monde »
sont les premières pensées duelles que l’on nous inculque afin de nous permettre de construire notre personnalité. Ces codes sont utiles
pour se faire comprendre et pour œuvrer en société, mais ils finissent par devenir une vérité absolue que peu de personnes s’aventurent à questionner.
La perspective duelle divise le réel en entités distinctes. Elle nous rend matérialistes dans tous les domaines de notre vie. Les êtres vivants comme la nature
deviennent des objets sans substance que l’on s’arroge le droit de contrôler, manipuler et exploiter. Des objets que l’on s’approprie ou jette en fonction de nos humeurs et nos besoins.
Nous perdons le sens de notre valeur et de notre existence. Cette vision dualiste nous enferme dans l’image du corps et crée une distance artificielle entre la nature et l’humain,
entre l’autre et moi, entre le corps et l’esprit. Elle est à l’origine de tous les rapports d’opposition, d’exclusion et de domination.
En perdant contact avec la vérité de notre être, nous nous sommes coupés de notre puissance intérieure. Un sentiment lancinant de manque et d’incomplétude nous envahit.
Nous avons alors besoin de posséder et de maîtriser pour nous sentir pleins et entiers. La vie devient ma vie, l’enfant devient ma fille ou mon fils, l’émotion devient ma colère.
Le monde coupé de son essence paraît chaotique. Chaque entité semble avoir le pouvoir de se mouvoir de manière autonome, selon sa volonté propre. Dans cette manière de voir, le monde nécessite un ordre imposé par l’esprit rationnel humain pour retrouver cohérence et harmonie. Mais ce besoin de le maîtriser et de l’arranger selon des normes fonctionnelles, mécanistes et mercantiles le désenchante. Le monde se réduit à des données, des statistiques et des définitions de plus en plus cloisonnées, spécialisées et complexes. Il perd sa profondeur, son unité et son mystère.
C’est pourquoi il est essentiel de s’interroger sur la vérité de la vision duelle.
Correspond-elle à un vécu ou est-elle une création de notre mental ? Est-ce une vérité absolue ou s’agit-il d’un code fonctionnel dans lequel nous sommes enfermés par ignorance ? Notre interrogation ne peut se contenter de rester purement intellectuelle. Seul un vécu concret d’unité est à même de rompre l’illusion.
Il s’agit de descendre au niveau de l’être, en amont de nos savoirs et de nos opinions, afin d’écouter et de recevoir les vibrations du monde sans les dénaturer. Au sein de cette perception directe, le regard n’est pas préhensif, il reste largement ouvert. Nous n’avons pas besoin d’isoler des portions du réel pour les objectiver et les tenir à distance. On se laisse toucher par la présence des êtres et des objets. Le besoin de se protéger s’assouplit, nos frontières fondent. Nous réalisons que rien n’est à l’extérieur, l’arbre, la montagne, l’enfant sont en nous. Nous goûtons leur substance qui est aussi la nôtre. Le substrat du monde se révèle. Il illumine toute la création. Chaque forme est saturée par sa pulsation à la fois douce et puissante.
Comment ne pas être émerveillé devant ce mystère infini qui nous constitue et qui est à l’origine du monde. Impossible de nous séparer de ce fond vibrant et lumineux. Il forme un tout indissociable où la multiplicité et les oppositions disparaissent.
La vision unitive est notre vision originelle. Elle s’actualise lorsque nous sommes déposés à la racine de nous-mêmes, dans l’être pur. Nous retrouvons le sens de notre valeur. Notre puissance n’est plus issue de la force de notre ego mais de l’énergie de la vie. Lorsqu’elle n’est plus réprimée par les injonctions et les impératifs de nos moi conditionnés, elle peut enfin trouver sa pleine expression. Notre confiance devient naturelle. Elle ne dépend plus de l’extérieur mais sourd directement de notre être. La peur n’est plus notre moteur. Les rapports de rivalité cèdent la place à l’écoute. L’émerveillement remplace la violence. Nous n’avons plus besoin d’écraser, d’humilier ou de manipuler pour sentir notre valeur. La singularité de chaque être vivant nous passionne. Nous la ressentons comme une facette de nous-mêmes. L’habitude de rejeter ou juger nous quitte.
Lorsque nous revenons à la racine de nous-mêmes, nous réalisons le pouvoir incroyable qui siège en notre cœur. Un pouvoir sain et naturel qui se vit dans le silence du cœur, dans la simplicité d’une présence dilatée dans l’espace.
Nous avons alors la possibilité de nous engager dans le monde sans créer de nouvelles dissonances, car le jugement et l’exclusion ne pervertissent pas nos actes.
Les dissonances dont souffre le monde sont issues de la vision duelle. Nous sommes hypnotisés par le jeu de notre mental qui, chaque matin, recrée le monde. Chacun de nous voit sa propre version de la réalité, plus ou moins apocalyptique, dramatique ou problématique. Il s’agit de démasquer ce jeu afin que cessent l’identification et l’attachement aux interprétations du mental. Nous réalisons alors que toutes nos pensées sur le monde ne sont que des voiles qui opacifient notre regard et le rendent aveugle à la vraie beauté. Nos yeux sensibles s’ouvrent, nous touchons le monde. Ses images s’estompent, deviennent translucides. Elles ne masquent plus la Source de lumière dont tout procède. Le Réel se révèle dans sa dimension infinie et inclusive.
Parfois Il nous met au défi de ne plus voir Sa beauté. Par exemple, lorsqu’il se manifeste sous la forme d’une guerre, d’une maltraitance ou d’une maladie incurable. Bien sûr, il ne s’agit pas de justifier ni de cautionner la cruauté. La violence de ces événements, où le doute peut nous faire vaciller et refermer notre cœur, exige une ouverture encore plus vaste, une compréhension encore plus profonde.
Le monde existe pour que les yeux du cœur s’ouvrent. Il est tel qu’il est pour nous enseigner l’écoute et l’accueil. S’il était trop confortable, trop enchanteur, nous prendrions le risque de nous endormir dans un confort relatif et étriqué. Le monde est là pour nous sortir du rêve duel qui nous hypnotise, tant au niveau personnel que collectif. L’inconfort et la souffrance ont un puissant potentiel d’éveil. Nous pouvons observer dans notre expérience combien chaque fois que nous avons été poussés dans nos limites nous avons mûri. Notre cœur s’est adouci et notre empathie a augmenté. L’ego en mûrissant s’assouplit et s’élargit. Moins centré sur lui-même, il se sent de plus en plus connecté à la totalité. La vision duelle s’estompe.
Nous avons ainsi la possibilité de reconnaître l’unité du Réel. Nous cessons de vouloir qu’il soit différent car nous savons que c’est ce désir même qui nous empêche de reconnaitre la Source immuable dont il procède. Le seul désir qui finit par nous habiter est celui de fondre toujours plus complètement en cette Source unique jusqu’à ce que plus aucune pensée duelle ne nous en extrait. Notre pratique spirituelle se résume à reconnaître et interroger, sur le vif, nos attachements qui sous la forme d’une croyance, d’une opinion ou d’une préférence nous voilent la vérité. Nous savons maintenant qu’il s’agit d’abandonner l’illusion au profit de la suprême Réalité.Le Réel est au-delà de toutes les oppositions et de toutes les contradictions car il contient la totalité de ce qui est. La réalisation de cette vérité est émerveillement, plénitude et félicité. Elle ne nous retient pas de rester engagés dans le monde, non plus à partir de notre idéologie ou de notre réactivité, mais à partir du cœur, de la source de l’Être.
C’est pourquoi il est essentiel de s’interroger sur la vérité de la vision duelle.
Correspond-elle à un vécu ou est-elle une création de notre mental ? Est-ce une vérité absolue ou s’agit-il d’un code fonctionnel dans lequel nous sommes enfermés par ignorance ? Notre interrogation ne peut se contenter de rester purement intellectuelle. Seul un vécu concret d’unité est à même de rompre l’illusion.
Il s’agit de descendre au niveau de l’être, en amont de nos savoirs et de nos opinions, afin d’écouter et de recevoir les vibrations du monde sans les dénaturer. Au sein de cette perception directe, le regard n’est pas préhensif, il reste largement ouvert. Nous n’avons pas besoin d’isoler des portions du réel pour les objectiver et les tenir à distance. On se laisse toucher par la présence des êtres et des objets. Le besoin de se protéger s’assouplit, nos frontières fondent. Nous réalisons que rien n’est à l’extérieur, l’arbre, la montagne, l’enfant sont en nous. Nous goûtons leur substance qui est aussi la nôtre. Le substrat du monde se révèle. Il illumine toute la création. Chaque forme est saturée par sa pulsation à la fois douce et puissante.
Comment ne pas être émerveillé devant ce mystère infini qui nous constitue et qui est à l’origine du monde. Impossible de nous séparer de ce fond vibrant et lumineux. Il forme un tout indissociable où la multiplicité et les oppositions disparaissent.
La vision unitive est notre vision originelle. Elle s’actualise lorsque nous sommes déposés à la racine de nous-mêmes, dans l’être pur. Nous retrouvons le sens de notre valeur. Notre puissance n’est plus issue de la force de notre ego mais de l’énergie de la vie. Lorsqu’elle n’est plus réprimée par les injonctions et les impératifs de nos moi conditionnés, elle peut enfin trouver sa pleine expression. Notre confiance devient naturelle. Elle ne dépend plus de l’extérieur mais sourd directement de notre être. La peur n’est plus notre moteur. Les rapports de rivalité cèdent la place à l’écoute. L’émerveillement remplace la violence. Nous n’avons plus besoin d’écraser, d’humilier ou de manipuler pour sentir notre valeur. La singularité de chaque être vivant nous passionne. Nous la ressentons comme une facette de nous-mêmes. L’habitude de rejeter ou juger nous quitte.
Lorsque nous revenons à la racine de nous-mêmes, nous réalisons le pouvoir incroyable qui siège en notre cœur. Un pouvoir sain et naturel qui se vit dans le silence du cœur, dans la simplicité d’une présence dilatée dans l’espace.
Nous avons alors la possibilité de nous engager dans le monde sans créer de nouvelles dissonances, car le jugement et l’exclusion ne pervertissent pas nos actes.
Les dissonances dont souffre le monde sont issues de la vision duelle. Nous sommes hypnotisés par le jeu de notre mental qui, chaque matin, recrée le monde. Chacun de nous voit sa propre version de la réalité, plus ou moins apocalyptique, dramatique ou problématique. Il s’agit de démasquer ce jeu afin que cessent l’identification et l’attachement aux interprétations du mental. Nous réalisons alors que toutes nos pensées sur le monde ne sont que des voiles qui opacifient notre regard et le rendent aveugle à la vraie beauté. Nos yeux sensibles s’ouvrent, nous touchons le monde. Ses images s’estompent, deviennent translucides. Elles ne masquent plus la Source de lumière dont tout procède. Le Réel se révèle dans sa dimension infinie et inclusive.
Parfois Il nous met au défi de ne plus voir Sa beauté. Par exemple, lorsqu’il se manifeste sous la forme d’une guerre, d’une maltraitance ou d’une maladie incurable. Bien sûr, il ne s’agit pas de justifier ni de cautionner la cruauté. La violence de ces événements, où le doute peut nous faire vaciller et refermer notre cœur, exige une ouverture encore plus vaste, une compréhension encore plus profonde.
Le monde existe pour que les yeux du cœur s’ouvrent. Il est tel qu’il est pour nous enseigner l’écoute et l’accueil. S’il était trop confortable, trop enchanteur, nous prendrions le risque de nous endormir dans un confort relatif et étriqué. Le monde est là pour nous sortir du rêve duel qui nous hypnotise, tant au niveau personnel que collectif. L’inconfort et la souffrance ont un puissant potentiel d’éveil. Nous pouvons observer dans notre expérience combien chaque fois que nous avons été poussés dans nos limites nous avons mûri. Notre cœur s’est adouci et notre empathie a augmenté. L’ego en mûrissant s’assouplit et s’élargit. Moins centré sur lui-même, il se sent de plus en plus connecté à la totalité. La vision duelle s’estompe.
Nous avons ainsi la possibilité de reconnaître l’unité du Réel. Nous cessons de vouloir qu’il soit différent car nous savons que c’est ce désir même qui nous empêche de reconnaitre la Source immuable dont il procède. Le seul désir qui finit par nous habiter est celui de fondre toujours plus complètement en cette Source unique jusqu’à ce que plus aucune pensée duelle ne nous en extrait. Notre pratique spirituelle se résume à reconnaître et interroger, sur le vif, nos attachements qui sous la forme d’une croyance, d’une opinion ou d’une préférence nous voilent la vérité. Nous savons maintenant qu’il s’agit d’abandonner l’illusion au profit de la suprême Réalité.Le Réel est au-delà de toutes les oppositions et de toutes les contradictions car il contient la totalité de ce qui est. La réalisation de cette vérité est émerveillement, plénitude et félicité. Elle ne nous retient pas de rester engagés dans le monde, non plus à partir de notre idéologie ou de notre réactivité, mais à partir du cœur, de la source de l’Être.
Article paru dans la revue 3e millénaire, juin 2022